Quand son client lui avait vendu “une sorte de vide grenier en plus sophistiqué” (ses mots) Victoire s’attendait plutôt à une après-midi plutôt tranquille dans les beaux quartiers, pas à une guerre de succession et une vente aux enchères rocambolesque, mais soit. Elle ne s’attendait pas non plus à ce que le propriétaire de tous les objets en vente soit en train de manger les pissenlits par la racine et que le tout soit organisé par le services des impôts qui ne veut que récupérer des fonds pour rembourser les dettes faramineuses du défunt. Clairement une situation qu’elle pourra se vanter d’avoir vécu et à laquelle le petit peuple, dont elle fait partie, n’est pas souvent convié. Sirotant un cocktail sans alcool proposé par le dernier majordome du manoir, fidèle à son employeur, elle parcourt la demeure où une flopée de gens riches (ou plutôt leurs spécialistes) se ruent sur le moindre verre à whisky pour en vérifier la valeur. Il n’y a rien qu’elle puisse se permettre de tout de façon, alors elle se délecte du spectacle et de sa boisson sucrée.

Mais c’est alors que ses yeux sont attirés par une silhouette qui sort de l’ordinaire, une femme d’au moins trente ans son aînée à la carrure imposante et avec une aura à faire pâlir les plus grands de ce monde. Elle la reconnaît tout de suite, il faut dire qu’elle l’avait en photo dans sa chambre d’adolescente, mais en combinaison de course et casque à la main. C’est tout de même Minnie Banks en personne et Victoire ne peut que rester plantée soudain droite comme un I en la regardant passer. Elle se souvient avoir dévoré ses interview dans les vieux magazines de courses de son père alors que les voitures, ce n’est même pas tellement son truc, mais Minnie c’est une femme qui vous cloue sur place, une femme qu’elle à toujours admiré alors que les autres gamins de son âge bavaient tous sur des groupes de musique aujourd’hui has-been. Rien ne saurait ternir l’image de Minnie Banks, pas même le temps.

Prise d’une incroyable énergie, Victoire lui cours après pour la rattraper mais au lieu de se présenter timidement, elle la dépasse et pose devant son idole un genou à terre.

- Madame c’est un honneur de vous rencontrer. Je suis depuis longtemps, une fan invétérée.

Elle relève la tête vers la belle dame, dont l’âge n’a jamais terni la beauté et essaye de déchiffrer son expression, mais elle ne peut rien lire derrière ses noires lunettes de soleil qui cachent des yeux probablement brillant comme la lune. Alors, sans s’essouffler elle continue sur sa lancée, en digne preux chevalier.

- Ce serait pour moi un plaisir de vous assister dans votre quête en ces lieux, si vous me le permettez. Je n’ai moi-même rien à acquérir ici et votre bonheur ne pourrait que me combler.